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Old 10th Oct 2009, 20:49
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jcjeant
 
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Hiden

Hi,

That's the other side of this tragedy ... sometime forgoten by many ........

Yemenia Airways, le crash oublié

LE MONDE | 08.10.09


Est-il possible qu'on les ait oubliés ? Est-il normal que le crash de l'avion de la Yemenia Airways du 30 juin, qui a endeuillé toute la communauté comorienne de France, ne fasse pas davantage l'objet de curiosité, voire d'indignation dans la société française ? Et si cela arrangeait tout le monde - diplomates, marchands de voyages et d'avions - que l'accident de l'A310, dans lequel ont péri 141 passagers dont 139 d'origine comorienne, figure à jamais parmi les faits divers non éclaircis ? Le juge des référés au tribunal de Paris a accepté, mercredi 7 octobre, qu'une médiation judiciaire soit mise en place concernant les avances sur les dommages et intérêts réclamées par les familles endeuillées, celles-là mêmes qui veulent tant éviter que le silence ensevelisse la tragédie.
Car leurs questions foisonnent, leurs accusations fusent. Proférées parfois avec colère, parfois les larmes aux yeux. Sans grand argumentaire. Dans un immense désarroi. Ecrire que la plaie des Comoriens de France est à vif est un euphémisme. Dans les quartiers de Marseille, où avaient embarqué 61 passagers de l'Airbus, où vivent encore 80 000 d'entre eux, elle est béante. Avec, partout, cette impression d'abandon, de "lâchage" par le reste de la société française, nourrie à la fois par les deuils multiples au sein d'une même famille, l'accumulation de difficultés matérielles, l'obligation de se confronter aux administrations et l'absence de vraies réponses sur les causes de l'accident.
"Tout se passe comme si la communauté comorienne, réputée si discrète, devait avaler en silence le drame du 30 juin et ne pas déranger... alors qu'elle est paumée !, dit Marie M'ze, 39 ans, qui a perdu sa mère et son jeune frère dans la catastrophe. Si vous saviez sa détresse !" Ces femmes, dont certaines ne parlent pas français, qui se retrouvent murées dans leur HLM, ayant perdu leur compagnon qui avait un travail, remplissait les chèques, les papiers et faisait l'interface avec la société. Ces hommes qui ont perdu une épouse avec un ou plusieurs enfants et sont désormais seuls, face à des petits - parfois ceux de leur compagne disparue - et totalement paniqués. Engagée dans une association de défense des familles de victimes, Marie découvre "des maisons où les enfants ont faim, des foyers surendettés où personne n'a la moindre idée des démarches à entreprendre, des familles qui n'ont pas encore reçu l'acte de décès du père auquel vient d'être adressée une lettre de licenciement pour ne pas s'être présenté à son travail en juillet ; parfois l'apparition d'un deuxième voire d'un troisième foyer pour un homme disparu dans l'Airbus..."
La complexité des identités et structures familiales n'a guère facilité le travail des administrations dans l'établissement des actes de décès. Quel labeur pour établir les identités précises des disparus, notamment parce que plusieurs d'entre eux ne voyageaient pas sous leur vrai nom. Et quel embarras pour démêler les liens de famille, l'état civil comorien étant des plus sommaires, les couples parfois unis religieusement ou par un rite coutumier n'étant pas forcément mariés officiellement, les reconnaissances d'enfants ne suivant pas toujours la filiation classique, quelques hommes ayant plusieurs foyers répartis entre les deux pays.
"Ce n'est pas la France d'en bas, c'est la France du sous-sol, avec toute l'obscurité que cela peut engendrer", remarque tristement Ahmed Mohamed, président d'une association des familles, qui tente, de HLM en HLM, d'apaiser, expliquer, unifier une communauté traditionnellement éclatée en de multiples associations. Ici, l'époux, chargé de cadeaux et des économies de toute la famille, partait assister au "grand mariage" d'un proche, cette cérémonie traditionnelle qui propulse un homme parmi les "notabilités". Prostrée, dépressive, sa veuve suit le deuil dans un habit traditionnel, un enregistrement du Coran diffusé à fort volume dans un appartement où chuchotent quatre gamins. Il arrive qu'elle appelle Ahmed, le soir, quand il lui manque un peu de lait. Là, deux petits garçons veulent téléphoner à leur père au ciel tandis que le troisième affirme : "Papa savait nager. Il est sur une île, ou enlevé par les pirates, il faut aller le chercher."
Abandon par la communauté nationale ? "Sentiment d'abandon", corrige Ahmed Mohamed, qui reconnaît l'existence, dans la région de Marseille, de nombreuses initiatives pour aider les familles des passagers. La mairie par la mise à disposition de locaux et de logistique, le conseil général par la mobilisation, lors de trois jours exceptionnels, de tous ses travailleurs sociaux, la région par le vote d'une aide d'urgence de 67 000 euros pour les familles.
Et puis surtout l'association Aide aux victimes d'actes de délinquance (AVAD), membre du réseau national d'aide aux victimes (Inavem), et son service d'urgence, constamment en soutien des familles. Recensement des proches, visites à domicile, liens avec les caisses d'allocations familiales, la Sécurité sociale, le RMI, les employeurs ; aides en matière de logement, d'école, de centre aéré. "Ils ont empêché beaucoup d'entre nous de sombrer", reconnaît une vieille dame.
Ce n'est donc pas tant sur le manque d'aides matérielles que repose la suspicion d'oubli que sur le mystère autour de l'accident. Sur le silence des boîtes noires arrivées endommagées en France le 31 août, et sur lesquelles un travail délicat a dû être fait pour en récupérer les données et les rendre exploitables. Sur l'absence réelle d'explication du crash auquel n'a survécu qu'une adolescente, sauvée par un pêcheur, mais qui a dit avoir entendu des cris lors de sa nuit passée dans l'eau, accrochée à un débris de l'avion...
"Bien sûr, le Bon Dieu est souverain. C'était probablement leur jour ! Mais disparaître ainsi dans la nuit, dans la mer, sans que l'on comprenne comment, pourquoi, à cause de qui, de quoi, c'est juste inacceptable. On a le droit de savoir. Et s'il y a des coupables, ils doivent être punis." Elle se tient droite, elle est émue, Djamila Ali, 31 ans, qui, depuis des semaines, se débat dans le chagrin, les difficultés financières et les questions. Sa soeur aînée et son neveu étaient dans l'avion pour Moroni. Et ce ne sont pas les paroles du président de l'Union des Comores, M. Sambi, affirmant aux familles des victimes, deux jours après le drame, que "leurs disparus sont morts en martyrs, cela devrait emplir leur coeur de joie", qui lui apportent un soulagement. Au contraire.
Quand elle rencontre d'autres jeunes femmes au sein d'une association marseillaise de victimes, les discours ont des accents de mutinerie. "Comment connaître la paix ?, demande Nadjati Youssoufa, 30 ans, qui a perdu deux frères et une sœur. On veut savoir pourquoi cet avion-poubelle pouvait encore voler ; pourquoi les secours ont tant tardé dans cette nuit de cauchemar où des passagers, à l'eau, auraient pu être sauvés. Il y a eu incompétence, non-assistance à personnes en danger. Et mépris pour nous tous."
Mépris ? Oui, mépris, approuvent d'autres femmes assemblées autour de Mariata Youssoufa, la sœur de Nadjati, dont l'association hisse le drapeau de la colère, nullement apaisée par la rumeur faisant état d'une erreur de pilotage. Mépris de la part de Yemenia Airways, cette compagnie basée à Sanaa, qui exploitait la ligne des Comores dans des conditions dénoncées en vain depuis des années et dont la communication avec les familles, depuis le crash, a été, selon elles, "lamentable". (Le Monde a tenté, sans succès, de joindre un responsable de la compagnie.) Mépris de la part des autorités des Comores, dont le mutisme et la responsabilité officielle dans la conduite de l'enquête continuent d'angoisser les familles. Mépris des cabinets d'avocats américains qui, dès le premier jour, ont accouru pour proposer aux familles désespérées leurs services, leur faisant miroiter des indemnités en millions de dollars, sur lesquelles, bien sûr, ils prélèveraient leur pourcentage. Mépris enfin du gouvernement français, ajoutent certaines, déçues que le président Sarkozy n'ait pas tenu sa promesse de recevoir les familles et qu'il ne semble pas vouloir exercer sur le Yémen la pression diplomatique qui leur paraît s'imposer. "Nous sommes français, pourtant !, proteste Nadjati Youssoufa. D'origine comorienne, certes. Avec des liens très forts avec nos îles. Mais Français. Alors, à l'Etat français d'être à nos côtés !"
Pour les familles, cet Etat a en tout cas un visage : celui de Christine Robichon, ex-ambassadrice de France au Soudan, chargée depuis le premier jour par le Quai d'Orsay d'assurer le lien avec les proches des victimes. Elle a multiplié les réunions, s'est rendue aux Comores, au Yémen, à Marseille, a reçu les associations, travaillé avec l'ambassadeur des Comores, tenu le plus possible informés tous les proches.
Mais les familles s'impatientent, convaincues qu'il est de l'intérêt des Comores et de Yemenia Airways de bloquer l'information. Elles craignent aussi que la menace d'annuler la commande de dix Airbus brandie par le patron de la compagnie yéménite, irrité par les premières critiques françaises, ne réfrène toute velléité d'enquête. "Trop de questions encombrent notre tête, note le vieil imam Danoun dans sa mosquée de la rue Gaillard. Cette communauté pacifique a droit à la vérité." Elle l'attend.
Annick Cojean
LE MONDE | 08.10.09


Is it possible that we had forgotten? Is it normal that the plane crash of Yemenia Airways June 30, which struck the entire community of Comorian France, does not further the object of curiosity or indignation in French society? And if that suited everyone - diplomats, merchants and airplane travel - the accident of the A310, which has killed 141 passengers including 139 of Comorian origin, is forever among the various facts unthinned? The judge at the Paris court agreed Wednesday, October 7, a mediation order be put in place on the advances of damages claimed by the bereaved families, the very ones who want to avoid both silence bury tragedy.
For questions abound, their accusations fuse. Uttered sometimes angrily, sometimes with tears in his eyes. Without much argument. In a huge confusion. Write the wound Comorians of France is keen is an understatement. In neighborhoods of Marseilles, which had 61 passengers onboard the Airbus, which has just 80 000 of them, it is gaping. With anywhere, that feeling of abandonment, "dropping" by the rest of French society, fed by both multiple bereavements within the same family, the accumulation of material difficulties, the obligation to confront the government and no real answers on the causes of the accident.
"It is as if the Comorian community, deemed so discreet, would swallow in silence the tragedy of June 30 and do not bother ... so it is paumée!, M'zee said Marie, 39, who lost his mother and his younger brother in the disaster. If you knew her distress! " These women, some do not speak French, which is found walled up in their public housing, having lost their companion, who had a job, met the checks, papers and made the interface with society. These men who have lost a wife with one child and are now only facing small - sometimes those of their missing companion - and totally panicked. Committed to an association defending families of victims, Mary discovers "homes where children are hungry, the indebted households where nobody has any idea of the steps to take, families who have not yet received the document father's death which has just been sent a letter of dismissal for failure to report to work in July, sometimes the appearance of a second or third home for a man who disappeared in the Airbus. .. "
The complexity of identities and family structures did not facilitate the work of governments in the establishment of death certificates. What work to establish the precise identities of the dead, especially because many of them do not travel under their real name. And what an embarrassment to unravel family ties, marital status Comorian being more sketchy, couples sometimes united by a religious or customary rites are not necessarily officially married, recognition of children do not always follow the classical descent few men having several homes located between the two countries.
"This is not the bottom of France is the France of the basement with all the darkness that it can generate," says sadly Ahmed Mohamed, president of an association of families who tries of HLM in HLM, soothe, explain, unify a community traditionally split into multiple groups. Here, husband, bearing gifts and economies of entire families, left to attend the "big wedding" to a close, the traditional ceremony that propels a man among the "notables". Prostrate and depressed, his widow mourning follows a traditional dress, a recording of the Quran with high volume disseminated in an apartment where four boys whispering. Sometimes she called Ahmed the evening, when it lacks a little milk. There, two little boys want to call their father in heaven while the third says: "Dad knew how to swim. It is on an island, or kidnapped by pirates, he must go get him."
Abandoned by the national community? "Feelings of abandonment," corrects Ahmed Mohamed, who recognizes the existence in the Marseilles region, many initiatives to assist families of passengers. The Town Hall by the provision of facilities and logistics, general council for the mobilization, during three days outstanding of all his workers, the region by the vote of emergency aid of 67 000 for families.
And then especially the association Aid to victims of crime (AVAD), member of the National Network of Victim Assistance (INAVEM), and emergency service, constant support of families. Census relatives, home visits, links with the family allowance, social security, RMI, employers, assistance in housing, schools, outdoor recreation areas. "They have prevented many of us from sinking," acknowledges an old lady.
This is not so much the lack of material aid that is the suspicion of neglect on the mystery surrounding the accident. In the silence of the black boxes arrived damaged in France August 31, and a delicate work which had to be made to recover the data and make them usable. On the actual lack of explanation of the crash in which a teenager has survived, rescued by a fisherman, but said he heard screams during the night spent in the water, clinging to a fragment of the plane ...
"Of course, God is sovereign. It was probably their day! But disappear in the night in the sea without an understanding of how, why, because of who, what, it's just unacceptable. We have the right to know. And if there are guilty, they must be punished. " She is right, it is moved, Jamila Ali, 31, who, for weeks, struggling in pain, financial difficulties and questions. Her older sister and nephew were on the plane to Moroni. And these are not the words of the President of the Union of Comoros, Mr Sambi, saying the families of the victims, two days after the tragedy, that "their dead relatives were martyred, that should fill their hearts with joy" which provide relief. On the contrary.
When she meets other young women in an association of victims of Marseilles, the speeches have accents of mutiny. "How can I find peace? Calls Nadjati Yusuf, 30, who lost two brothers and a sister. We want to know why the plane could still fly garbage, why the relief effort so late in the night of nightmare where passengers water could have been saved. There were incompetent, non-assistance to endangered persons. And contempt for us all. "
Contempt? Yes, contempt, trusting other women gathered around Mariata Youssoufa's sister Nadjati, whose association hoisted the flag of anger, not appeased by the rumor of a pilot error. Contempt from Yemenia Airways, the company based in Sana'a, which operated the line of Comoros in conditions complained in vain for years and whose communication with the family since the crash, was, according to them, "lamentable" . (The world has tried, unsuccessfully, to join a company official.) Contempt of the authorities of the Comoros, whose silence and official responsibility in the conduct of the investigation continue anguish families. Contempt for U.S. law firms who, from day one, have rushed to offer their desperate families to services, with promises of compensation in millions of dollars, on which, of course, they would collect their percentage. Contempt of the French government finally, add some, disappointed that President Sarkozy has not kept his promise to accommodate families and it does not seem to want to exert on the Yemeni diplomatic pressure they deem necessary. "We are French, though!, Protests Nadjati Youssoufa. Comorian Originally, of course. With strong links with our islands. But French. So, the French state to be on our side!"
For families, the state has at least one face: that of Christine Robichon, former Ambassador of France in Sudan, loaded from the first day of the Quai d'Orsay to maintain the link with the relatives of victims. She has held many meetings, visited the Comoros, Yemen, Marseilles, received the association, worked with the Ambassador of the Comoros, held as much as possible all the relatives informed.
But families are getting impatient, he is convinced of the value of the Comoros and Yemenia Airways to block information. They also fear that the threat to cancel the order for ten Airbus wielded by the head of the Yemeni company, irritated by the early French critics, not curbs any hint of investigation. "Too many questions cluttering our head, note old imam at his mosque Danoun of Gaillard Street. This peaceful community is entitled to the truth." She waits.
Annick Cojean
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