PPRuNe Forums - View Single Post - Flash Air crash: 135 Français tués
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Old 3rd Mar 2004, 17:37
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Manflex55
 
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Figaro de ce matin:

Charm el-Cheikh : le scénario de la catastrophe

C'est une erreur humaine, consécutive à une anomalie technique, qui est à l'origine de la catastrophe de Charm el-Cheikh. Ce drame ne s'écarte donc pas d'un scénario à l'origine de 70% des accidents aériens. Dans le crash survenu il y a exactement deux mois, le 3 janvier, ont péri 148 personnes dont 135 touristes français. L'équipage croyait avoir mis en service le pilote automatique. En fait, ce dernier ne s'est jamais enclenché. Et les pilotes n'ont probablement jamais réussi à identifier cette défaillance. Livré à lui-même, le Boeing 737 est parti progressivement en virage, puis a piqué vers la mer. Grâce à l'analyse des bo'tes noires, il est aujourd'hui possible de reconstituer les différentes phases du vol FSH 604 du 3 janvier 2004.


Ce samedi matin à l'aube, le Boeing 737 de la petite compagnie égyptienne Flash Airlines est affrété par des voyagistes français pour le retour de vacanciers qui ont réveillonné au soleil. Il décolle de la piste 22, d'abord à destination du Caire où est prévue une escale technique, puis pour Paris. Le «pilote en fonction» pour cette courte étape est le commandant de bord de l'avion, assis à gauche, un ancien général de l'armée de l'air égyptienne ; la répartition des tâches prévoit qu'il s'occupe de la trajectoire et de la navigation. Son collègue assure les liaisons radio et gère les différents systèmes (carburant, pressurisation, électricité, etc.). Tous deux sont des pilotes confirmés. Ils comptent respectivement 500 heures et 250 heures de vol sur des Boeing 737.


Tout se passe normalement : rotation vers 150 noeuds (270 km/h), les roues quittent le sol, s'encha'nent la rentrée du train, puis celle des volets. Une légère réduction de puissance soulage les réacteurs très sollicités au décollage alors que l'avion vire lentement vers la gauche. Le pilote a agi sur le manche en conséquence. La procédure à Charm el-Cheikh impose d'abord de virer vers l'est tout en montant pour s'éloigner du relief du Sinaï avant de mettre cap au nord-ouest vers Le Caire. L'appareil accélère vers 250 noeuds (450 km/h). Comme sur tout avion de ligne, le pilote automatique peut être enclenché peu après le décollage. Le pilote lâche alors les commandes, confiant au calculateur le soin de diriger l'avion.


En réalité, à cet instant-là, le pilote automatique ne s'est pas mis en service. Plus grave, l'équipage ne s'en est pas aperçu. Les gouvernes sont libres. Insensiblement, très paisiblement, l'appareil augmente son rayon de virage, prend un instant une trajectoire rectiligne, puis s'incline de l'autre côté, vers la droite, ce qui provoque un virage dans cette direction. L'équipage constate que «quelque chose ne va pas», mais ne comprend pas. Il est «surpris» car il considère que l'avion est toujours sous pilote automatique.


Les deux hommes dialoguent en permanence, mélangeant langues arabe et anglaise, cette dernière désignant les termes techniques. Ce bilinguisme est la norme dans tous les cockpits du monde. Leur discussion qui va durer quelques secondes n'est pas structurée. Elle est hachée : «Ce cap n'a pas été choisi», «je ne suis pas d'accord», «c'est anormal». Tel est le ton de leurs échanges d'où sourd, certes, de l'inquiétude face à une situation inconnue mais en aucun cas de la panique. De manière très professionnelle, les deux pilotes tentent d'analyser la situation et de ma'triser le problème.


L'avion est alors en montée, avec un angle d'une dizaine de degrés. L'équipage, dans cette configuration, ne dispose pas de référence extérieure à travers le pare-brise, même par nuit claire. Sous l'avion, les enseignes multicolores des hôtels de Charm el-Cheikh ne sont pas visibles. Quelles indications donnaient les instruments de bord ? Ont-ils été défaillants ? Ces écrans vidéo sont doublés par des systèmes de secours, fonctionnant même en cas de panne électrique.


Livré à lui-même, le Boeing 737 continue son évolution vers la droite, sur «l'axe de roulis», diront les spécialistes. Lentement mais inexorablement, l'avion passe sur la tranche : le plan des ailes est alors perpendiculaire au sol. Un appareil de voltige peut rester quelques secondes dans cette position, soutenu par son moteur. Le Boeing 737 n'en a pas la capacité. Les ailes n'assurent plus la portance, le nez bascule vers le bas et l'avion descend en «virage engagé». La vitesse augmente mais sans accélération brutale. Les passagers subissent une chute d'une quinzaine de secondes dont ils ne se sont pas nécessairement rendu compte.


Un appareil de génération récente, comme un Airbus ou un Boeing 777 équipés de commandes électriques de vol, n'aurait jamais pu se retrouver dans cette situation. L'ordinateur de bord interdit, par exemple, des virages à plus de 30° d'inclinaison.


Jusqu'à la fin, les deux pilotes ont pensé pouvoir ma'triser la situation. Aucune exclamation de découragement ou même d'étonnement n'a retenti dans le cockpit. Juste avant de tomber dans la mer Rouge, ils ont peut-être pris véritablement conscience de la situation : ils tentent une ultime manoeuvre de récupération mais l'avion est trop bas. Une légère inflexion de la trajectoire a été constatée sur la bo'te noire, moins de quatre secondes avant l'impact. La surface de l'eau a la consistance du béton et le Boeing s'est désintégré sous le choc, entra'nant la mort immédiate de ses passagers.

«Notre rôle est de savoir pourquoi l'équipage est arrivé à une telle situation. Pour comprendre, il faut d'abord poser la bonne question, puis apporter la réponse», explique, très cartésien, Paul-Louis Arslanian, directeur du Bureau d'enquêtes et d'analyses pour la sécurité de l'aviation civile, pour qui «l'investigation continue» et «tous les moyens sont bons». Les enquêteurs américains du NTSB sont plus particulièrement chargés du comportement de l'avion tandis que les Égyptiens, ma'tres d'oeuvre de l'enquête, rassemblent les informations sur l'équipage, sa formation et ses antécédents ainsi que sur la compagnie aérienne. L'enquête judiciaire française qui suit son cours en Égypte servira, quant à elle, à établir des responsabilités pénales.




Commentaires officiels:

L'annonce du Figaro est "une pure spéculation et nous travaillons très dur pour parvenir à un résultat le plus rapidement possible", a déclaré Chaker Qelada, le chef des enquêteurs égyptiens. "Nous voulons publier quelque chose de sûr et cela prendra du temps", a-t-il ajouté, précisant que les experts français du BEA "coopéraient parfaitement" avec les enquêteurs égyptiens.

"Aucun élément précis à ce jour ne permet d'expliquer ce qui s'est réellement passé à Charm el-Cheikh", précise-t-on mercredi au BEA. Le Bureau, qui devrait publier un communiqué mercredi dans la journée, n'a pas souhaité faire d'autre commentaire à l'article du journal français.

Last edited by Manflex55; 3rd Mar 2004 at 17:55.
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