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View Full Version : Charm el-Cheikh : enquête sur les contrôles du Boeing de Flash Airlines


flyblue
17th Jan 2004, 01:45
LE MONDE | 16.01.04
En onze années d'exploitation, le Boeing qui s'est ab'mé en mer Rouge a été utilisé par sept compagnies aériennes. En France, il n'a été inspecté qu'une seule fois. "Le Monde" révèle le contenu de cette inspection ainsi que de celle qui avait conduit à l'interdiction de l'appareil en Suisse.
Avant de s'écraser en mer Rouge, quatre minutes seulement après son décollage de l'aéroport de Charm el-Cheikh, samedi 3 janvier, tuant 148 passagers et membres d'équipage, le Boeing 737 de Flash Airlines avait été exploité onze ans. Durant cette "carrière", l'appareil a été utilisé par pas moins de sept compagnies aériennes. Il n'a en revanche croisé qu'une fois la route des inspecteurs français de l'aviation civile, pour un contrôle rapide, et non trois fois comme cela avait été indiqué par les autorités françaises au lendemain de la catastrophe.

Livré au leader californien de la location d'avions, ILFC (International lease finance corp.) le 22 octobre 1992, l'appareil avait été commandé à Boeing le 16 mai 1988. Il totalisait 17 973 heures de vol et 25 592 cycles (un cycle comprenant un décollage et un atterrissage). La première immatriculation du Boeing 737-300 numéro de série 26 283 est américaine : il vole jusqu'en 1998 chez Taca, compagnie salvadorienne. En 1998, le Boeing 737 se retrouve chez le Norvégien Color Air sous immatriculation britannique. Il y volera jusqu'au dépôt de bilan de la société, en février 2000. L'avion retourne voler temporairement sous pavillon américain, avant de trouver un nouvel utilisateur : pour la première fois, l'avion intègre la flotte de Flash Airlines. Mais au mois de mai, ILFC en reprend la pleine propriété pour finalement le relouer de nouveau à Flash Airlines qui lui redonne une immatriculation égyptienne (SU-MBA). D'octobre 2000 à juin 2001, l'avion est sous-loué à une autre compagnie, avant de rejoindre une dernière fois la flotte de Flash Airlines, et d'obtenir son ultime immatriculation, SU-ZCF.

Si la vocation des avions appartenant aux grands loueurs comme ILFC est de changer plus ou moins fréquemment de compagnies, la plupart des appareils sont attribués pour des périodes assez longue, de sept, huit ou dix ans. Les changements fréquents d'utilisateurs du Boeing incriminé ouvrent ainsi des interrogations sur sa maintenance et son entretien.

Ces questions ont été alimentées par les témoignages et les souvenirs d'anciens passagers de Flash Airlines mais aussi très largement par l'Office fédéral de l'aviation civile (OFAC) suisse. Cet organisme, équivalent suisse de la Direction générale de l'aviation civile (DGAC), a fait état, dès les premières heures qui ont suivi l'accident, par l'intermédiaire de sa porte-parole, d'" importants manquements" constatés lors d'un contrôle inopiné effectué au mois d'octobre 2002. Ces révélations ont été le point de départ d'une polémique sur la qualité et la fiabilité des contrôles effectués par les différents pays adhérents au programme SAFA (Safety assessment of foreign aircraft), programme d'évaluation de la sécurité des appareils mis en place par la Conférence européenne de l'aviation civile (CEAC), organisation intergouvernementale.

Ce programme de contrôle prévoit au maximum l'examen de 53 points répartis en trois grandes parties : la documentation, les équipements et l'état apparent de l'appareil. Rien n'oblige toutefois l'inspecteur à vérifier tous les items à chaque contrôle. En outre, il a pour consigne de ne jamais retarder inutilement l'avion contrôlé. Enfin, il peut éventuellement se concentrer sur un seul problème particulier. A la fin de l'opération, chaque point non conforme est noté de 1 à 3 selon un critère de gravité. Les résultats des enquêtes sont ensuite aiguillés vers une base de données accessible à tous les membres adhérents au programme. En France, 25 inspecteurs de la DGAC sont formés au contrôle de type SAFA. En 2002, 3 234 inspections ont été réalisées pour 532 compagnies originaires de 115 états.

L'AUTRE BOEING 737

Les réponses françaises apportées aux accusations de l'OFAC ont été parcellaires. Eprouvant des difficultés a accéder à la banque de donnée SAFA, la DGAC a, dans un premier temps, assuré qu'elle n'avait pas connaissance d'informations préoccupantes sur la compagnie égyptienne Flash Airlines. Dans un second temps, Gilles de Robien, ministre des transports, a indiqué que la DGAC avait reçu un avis de réserve de la Suisse à propos de Flash Airlines mais que depuis, trois contrôles avaient été réalisés par l'aviation civile française : " Le premier, il y avait encore quelques petites réserves, les deux autres étaient sans aucune réserve, c'était à l'automne 2003", affirmait-il le dimanche 4 janvier, au lendemain de la catastrophe.

Le Monde s'est procuré les quatre rapports d'inspection SAFA : celui des inspecteurs ainsi que les trois rapports réalisés après les contrôles effectués en France. Contrairement à ce qui avait été indiqué, un seul de ces trois rapports concerne l'avion en cause dans le crash de Charm el-Cheikh (SU-ZCF) : il a été réalisé à Toulouse-Blagnac le 22 octobre 2003.

Les deux autres ont porté sur l'autre Boeing 737 de Flash Airlines (SU-ZCD). L'un a été effectué à Lyon-Saint-Exupéry le 15 octobre 2003 et a révélé trois anomalies : deux de niveau 2 (pneus du train d'atterrissage avant en mauvais état et pas de spécifications particulieres entre le nombre d'hommes et de femmes à bord, pour le poids) et une de niveau 1 (quelques vis manquantes sous les ailes). L'autre a été fait le 8 novembre à Marseille et n'a constaté aucune anomalie.

Le seul contrôle français sur l'appareil SU-ZCF, effectué au cours d'une escale à Toulouse le 22 octobre 2003, n'a pas non plus constaté d'anomalies. Mais il n'a toutefois porté que sur 20 points de la check-list, essentiellement sur la documentation de l'appareil (10 points de contrôle) et son aspect général extérieur (10 points de contrôle).

Le contrôle effectué à Zurich un an auparavant, le 11 octobre 2002, avait été beaucoup plus complet. Il avait porté sur l'ensemble des points de cette check-list. A la fin de son inspection, l'inspecteur suisse a relevé 14 points qui posaient problèmes : 7 avaient un niveau de gravité 3, 2 de niveau 2 et 5 de niveau 1. Selon la classification SAFA, une anomalie de niveau 3 " a un effet majeur sur la sécurité de l'exploitation de l'aéronef" et des actions correctives peuvent être exigées avant que l'avion ne reparte. Toutes les anomalies de niveau 3 avaient été corrigées avant le départ : les cagoules antifumée manquantes de l'équipage ont été remplacées, la base de donnée de gestion du vol qui était périmée a été remise à jour, les zones des prises statiques ont été nettoyées, les doutes sur la compression des jambes de trains levés et le filet de la zone cargo endommagé a été changé avant le départ. Néanmoins, à la suite de ce contrôle, les Suisses avaient pris la décision d'interdire à l'avion leur territoire et leur espace aérien.

Un an plus tard, l'avion qui a été rapidement examiné à Toulouse n'avait toutefois plus grand-chose à voir avec celui qui avait été inspecté sur l'aéroport de Zurich. En effet, du 4 novembre 2002 au 20 décembre 2002, le Boeing SU-ZCF a subi une inspection majeure dans les ateliers de Braathens en Norvège à Stavanger. L'appareil avait obtenu son approbation pour une remise en service. " L'appareil est parti dans un état que nous considérons comme bon" a précisé le vice-président de la division technique de Braathens, Harald Rosnes. "Nous n'avons pas touché aux moteurs, qui ont une vie à part, indépendante du reste de l'appareil", a-t-il ajouté. De fait, un changement de moteur a également été réalisé au Maroc au début de l'année 2003 sur l'appareil. Le moteur, un CFM 56-3 C1 a été vérifié par Snecma Morocco Engine Services, une filiale commune avec Royal Air Maroc (RAM) installée sur l'aéroport de Casablanca. Ce moteur a été déposé à la fin 2002 pour être révisé. Il a ensuite été reposé en janvier 2003.

Reste qu'une compagnie aérienne est d'abord surveillée par l'autorité de l'aviation civile où elle est immatriculée et que cette dernière a un traitement identique qu'elle soit charter ou compagnie régulière. Ces autorités sont elles-mêmes systématiquement "auditées" par l'organisation internationale de l'aviation civile (OACI). L'Egypte l'a été en 1992 et en mars 2002 et les résultats étaient satisfaisants. La France a été pour sa part auditée en 1999 et en 2001 et le constat était également satisfaisant.

François Bostnavaron


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Le juge français se rendra en Egypte


Le vice-président du tribunal de grande instance de Bobigny (Seine-Saint-Denis), André Dando, chargé de l'enquête judiciaire française sur l'accident d'avion de la compagnie Flash Airlines, peut enfin partir en Egypte. Son homologue égyptien a agréé - verbalement - la commission rogatoire internationale délivrée le 4 janvier, au lendemain du crash du Boeing, après que le président égyptien, Hosni Moubarak, et le ministre des affaires étrangères français, Dominique de Villepin, se sont entretenus de la nécessaire collaboration entre l'Egypte - pays souverain où la catastrophe s'est produite - et la France, dont les victimes étaient des ressortissants. M. Dando arrivera dimanche 18 janvier au Caire, puis partira pour Charm el-Cheikh. Xavier Mulot, qui fut responsable de l'enquête sur l'accident du Concorde, le 25 juillet 2000 à Gonesse (Seine-Saint-Denis), et a été "rappelé" pour mettre en place une cellule baptisée "Charm el-Cheikh 93" à Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-denis), a, lui aussi, gagné l'Egypte, jeudi 15 janvier, où il a retrouvé le nouveau directeur de l'enquête, le lieutenant Georges Kaemmerlen (Le Monde du 8 janvier).

ATC Watcher
17th Jan 2004, 04:00
Tout ceci est deplorable et donne une image desastreuse du " charter " . ce qui est difficile a admettre c´est que la transparence tant criee par nos enarques et polythechniciens dirigeants de nos instances de tutelles, s´ avere des plus opaques des que l´on touche aux intrerets economiques..
Les pleurs des Tours operateurs qui crient " on ne savait pas " ou encore : " la DGAC nous a assurre que telle compagnie etait sure alors on ne se pose pas de questions " ... me fait :yuk:

Je ne connaissait pas Color mais je sais qu´ils n´ont pas laisse de bons souvenirs aux norvegiens, par contre je connaissait bien TACA, surtout dans les annees 80. Leur service de maintenance etait le seul qui etait paye a temps car ils avaient la manie d´enlever des pieces esentielles aux avions pour faire du chantage a la compagnie quand leur salaires etaient en retard.
J´ai vu un de leur Bac 111 immatricule en Irlande voler sans CN pendant 7 mois.. Je ne sais pas dans quel etait le 737 est parti du Salvador , ni ce qu´il y avait d´ecrit sur le maintenance log.. Dans toute l´Amerique latine ,a cette epoque , avoir le tampon adequat n´etait qu´une question de dollars a la bonne personne.

flyblue
17th Jan 2004, 20:51
Un copain travaillait dans une boite charter d'un pays EU. Il s'est licencié parce que le patron de la boite prétendait qu'ils fassent des trucs illégaux (je ne vais pas entrer dans le détail).
Ce matin ledit patron était à la télé dans une émission sur la sécurité des vols...en train d'expliquer le pourquoi du comment sa compagnie était sure à 100%, pas comme chez les égyptiens! :*