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View Full Version : Boeing: un «avion de rêve» pour retrouver la ligne


flyblue
16th Jan 2004, 00:38
L'avionneur américain a ouvert son carnet de commandes pour son premier avion entièrement nouveau depuis 1990, un appareil moins gourmand en carburant et susceptible, selon les spécialistes, de relancer un secteur plutôt déprimé.

Washington, de notre correspondant

Confronté à la concurrence de plus en plus sévère d'Airbus, le groupe Boeing a décidé d'aller de l'avant et de lancer son nouvel avion 7E7, surnommé le «Dreamliner» («l'avion de rêve»). Quinze jours après la démission du patron Phil Condit dans une atmosphère de scandale (Libération du 2 décembre), le conseil d'administration du groupe, réuni dimanche et lundi à Chicago, a donné le feu vert à la mise en production de cet avion de 200 à 250 places. Les dirigeants de Boeing ont réservé la nouvelle, hier soir, aux employés de la division aéronautique civile lors d'une conférence de presse à Seattle, dans l'Etat de Washington, où sont basées les usines historiques de l'avionneur. C'est la première fois, depuis dix ans, que Boeing lance un nouvel avion. Le 7E7, qui sera produit sur le site d'Everett dans la banlieue de Seattle, doit transporter ses premiers passagers en 2008.

Pari. Le lancement du 7E7 est un gros pari sur lequel le tout nouveau président du groupe, Harry Stonecipher, joue désormais son mandat. Affectée par la crise des compagnies aériennes, la branche «civile» de Boeing n'est pas dans une situation très enviable. Le constructeur n'a réussi à maintenir la rentabilité de ce secteur qu'au prix d'une réduction de moitié de la production d'avions commerciaux. Et ses effectifs sont passés de 93 000 à 55 328 depuis les attentats du 11 septembre 2001.

Alors que les spécialistes annoncent le redémarrage du marché des avions civils en 2005, Boeing compte sur le 7E7 pour repartir à l'assaut. Le pari du Dreamliner est lourd, puisque son développement coûtera à lui seul 10 milliards de dollars au groupe (8 milliards d'euros). Mais le groupe américain table sur des commandes de 2 000 à 3 000 7E7 sur les vingt prochaines années, les compagnies aériennes devant progressivement renouveler leur flotte. Selon les analystes, le nouveau président de Boeing n'avait de toutes façons guère le choix, sauf à prendre la décision d'un désengagement du secteur : «S'il ne l'avait pas fait, Airbus aurait été seul sur le marché des avions dans quarante ans», a ainsi déclaré John Murray, de Delaware Investment, à l'agence Reuters.

Le groupe européen a pris un net avantage sur Boeing, avec un carnet de commandes supérieur à celui de l'américain depuis plusieurs années (1 467 avions contre 1 112 en 2003). Pour la première fois cette année, l'américain aura livré moins d'avions que son concurrent européen : 275 contre 300. Les deux concurrents fondent désormais leur stratégie sur deux analyses diamétralement opposées du marché. «L'avenir du transport aérien ne se situe pas dans le transport de masse de longue distance», n'a cessé de répéter Phil Condit, l'ancien PDG de Boeing, tout au long de la phase de développement de l'A380 (555 sièges), histoire de plomber le projet d'avion géant de son concurrent qui commencera à voler en 2006. Selon lui, la stratégie du «hub à hub», où chaque appareil déverse des milliers de passagers sur les grandes plateformes aéroportuaires, est vouée à l'échec, en dépit du développement des marchés asiatiques. L'avenir, estiment les experts de Boeing, appartient aux avions de taille moyenne, mais ultraéconomiques.

Sous-traitants. La décision prise par Boeing est un soulagement pour ses sous-traitants, que ce soit au Japon, où sera fabriqué un tiers de la structure de l'avion (chez Kawasaki Heavy Industries, Fuji Heavy Industries, Mitsubishi Heavy Industries), au Texas (Vought Aircraft Industries) et en Italie (Alenia Aeronautica). Le nombre d'emplois que créera aux Etats-Unis la production de 7E7 n'est pas gigantesque : 800 à 1 200 ouvriers suffiront pour l'assembler à Everett. Dans l'usine de Wichita (Kansas), la production de pièces détachées fournira, elle, du travail à 4 000 ouvriers.

Liberation.fr